MARY ELLEN DAVIS
 
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MEXICO, DEAD OR ALIVE

 
   
 

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Le Devoir, le mardi 15 octobre 1996

- Culture -

Cinéma

Les difficultés de la lutte pacifique

Mexique mort ou vif expose clairement la situation des opposants politiques dans ce pays

MEXIQUE MORT OU VIF

Film de l'ONF. Recherche et réalisation: Mary Ellen Davis avec la participation de Mario Rojas Alba, 52 miIi. Première aujourd'hui, 20h, à la Maison de la culture Frontenac (entrée gratuite) dans le cadre de la semaine Amnistie Internationale

 

CLÉMENT TRUDEL LE DEVOIR

Fusillé en tant que «traître» en 1815, le prêtre-guérillero José Maria Morelos a aujourd'hui une place d'honneur sur Internet. La chronique des événements que nous présente l'ambassade mexicaine au Canada s'arrête cependant en octobre 1995 sur http://www.DocuWeb.ca/Mexico.

On y relient de Morelos ce passage pour présenter le dossier des «droits humains» au Mexique: "tant et aussi longtemps que des personne-s ayant des principes croient être obligées ou avoir le droit de condamner ou de persécuter ceux et celles qui sont fidèles à une doctrine dIfférente ou opposée, tant... qu'on n'aura pas pris l'habitude de tolérer les opinions contraires et d'éviter la censure, la renaissance politique du peuple sera impossible...» A noter que le tout premier président de la Commission nationale des droits humains, Jorge Carpizo, s'est déjà plaint d'espionnage téléphonique!

Vivant à Montréal depuis quatre ans. le Dr Mario Rojas Alba est sans doute la preuve a contrario du bien-fondé des préceptes de Morelos. Elu député sous la bannière d'un parti d'opposition, le Parti révolutionnaire démocratique (PRD), Rojas, qui a obtenu le statut de réfugié politique au Canada après qu'on eut tenté de l'assassiner, a notamment publié une chronique non exhaustive des crimes politiques dans son pays de 1988 à 1993: Manos sucias (Les Mains sales). Travail minutieux, éloquent, sur une violence politique qui a eu cours avant et durant le mandat de Carlos Salinas de Gortari (le PRD eut plus de 300 victimes durant cette période).

Mario Rojas nous revient maintenant dans Mexique Mort ou vif . Il nous y sert de guide face aux paradoxes de son pays.

Rojas a «trouvé une manière commode de de vivre à l'étranger», il s'est «autoexilé» , dit un haut placé du PRI (parti révolutionnaire institutionnel, au pouvoir depuis 1929), Carlos Peredo. Quant à l'un des assassins les plus actifs pour des fins politiques dans l'Etat de Morelos. «c'était un mauvais policier... rien de politique dans cela... il est dans la prison de haute sécurité d'Almoloya», dit un autre fonctionnaire interviewé. Marco Manuel Suarez, juriste (42 ans de militantisme dans le PRI), a été «chef du pouvoir judiciaire» dans l'Etat de Morelos dont Rojas était député, il confie: "de mon temps... on n'assassinait pas». Un inconditionnel du PRI, Jorge M. Araujo, a toutefois cette phrase qui glace: «si le PRI disparaît, le coût du changement sera élevé», laissant entendre qu'il y aurait 20 millions de Mexicains en moins...

Valeur anthropologique

Mexique mort ou vif a valeur anthropologique, sur les rites reliés aux morts notamment. C'est une tranche d'histoire orale fournie par de nombreuses veuves qui réclament justice dans un pays où modernisation et violence vont de pair, selon le commentateur Yuri Serbolov. Devant des amis qui ne lui conseillent pas de rentrer ("il faut ménager les forces de changement»), Rojas se sent perplexe; il s'identifie à l'amate, arbre qui a "une vie difficile et tourmentée au bord des abîmes», et se fait philosophe: "les fleurs reviennent à chaque printemps».

Ce film aux coloris envoûtants illustre la difficulté (non pas l'impossibilité) d'une lutte pacifique dont Rojas et d'autres Mexicains posent courageusement les balises.

PHOTO ENRIQUE TORRES

Don Emeterio Pantaleon, vétéran de la Révolution mexicaine, tel qu'il apparaît dans le film de Mary Ellen Davis.

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